Le 24 octobre sortiront les nouvelles aventures d’Astérix et Obélix.Pour cet opus qui se déroulera chez les Pictes, c’est un auteur ariégeois qui est à la manœuvre : Jean-Yves Ferri. Interview.
La sortie approche. Des inquiétudes ?
Les inquiétudes, elles sont venues bien en amont, quand j’ai été chargé du scénario. De toute façon, on entendra toutes sortes de commentaires. C’est fait, c’est fait.
Cela n’a pas été toujours simple. Mais, avec Didier Conrad (le dessinateur) on nous a fait confiance et nous avons fait notre job. Nous ne sommes ni Uderzo, ni Goscinny. J’ai travaillé à l’affectif. Certes, il y a de la perfection à apporter. Cela se fera petit à petit. Mais, déjà cela ressemble à un Astérix.
Vous comptez donc en faire un second ?
Rien n’est sûr. Mais, ce n’est pas exclu d’en faire un autre. J’aimerais continuer. On en discute en ce moment. Il faut être sûr de son coup. Je n’ai pas envie de faire une grosse bouse.
Comment avez-vous choisi les Pictes ?
Astérix, c’est un coup au village, un coup à l’extérieur. Je suis tombé sur la case voyage. Or, il ne restait pas cinquante possibilités. Il y avait l’Écosse qui n’avait pas été explorée.
J’aime bien ce pays. J’ai regardé ce qu’il y avait en Écosse à l’époque d’Astérix. Et je suis tombé sur les Pictes.
On va voir le monstre du Loch Ness ?
Bien sûr, il y aura le Loch Ness. Cela reste fidèle à Astérix. On retrouve tous les stéréotypes du pays visité.
Rassurez nous, il y aura aussi des bagarres ?
C’est obligé. J’ai dû me forcer car je ne suis pas violent comme mec. Mais pour faire un Astérix, il faut de la bagarre et des banquets. Il faut aussi mettre des personnages du village. Les lecteurs ne comprendraient pas de ne pas retrouver Agecanonix ou Assurancetourix. Le village est traité comme un personnage en soi.
Vous vous êtes amusé à faire Astérix ?
En partie. Il y a un côté rigolo. Comme je dis souvent, Astérix est un beau jouet. Il y a un petit monde attirant. Mais, il y a aussi des codes et des règles. Et là on rigole moins. J’ai essayé d’être dans le droit fil de ce qu’attendent les lecteurs. Je lisais Astérix quand j’étais gamin. La barre était assez haute. J’avais une petite responsabilité.
Justement Uderzo a-t-il été présent ?
Il m’a laissé une liberté totale. J’ai eu une paix royale. Conrad a plus souffert.
Comment Uderzo a accueilli votre travail ?
Il est content. Il tenait à ce que cela reste artisanal, pas une histoire de studio. Nous évoluons dans un monde d’auteur, autant Conrad que moi.
C’est très différent de ce que vous aviez l’habitude de faire…
Dans Astérix, l’humour est très théâtral, très joué. Alors que moi j’avais l’habitude de faire l’inverse, notamment avec «Retour à la terre». Il a fallu travailler dans cet esprit.
Pour y arriver, vous avez relu toute la collection ?
Je n’ai pas fait un travail d‘historien. Je me suis surtout imprégné de l’atmosphère afin qu’il n’y ait pas de contresens. Je me suis inspiré des albums de l’époque des sixties. Pour une transition, je me suis dit que c’était bien de retrouver cette époque-là.
À quoi correspond-t-elle ?
C’est l’époque que je qualifierais de plus enfantine. Il y a les Normands, les jeux olympiques, le légionnaire, les Bretons, le combat des chefs… C’est l’âge d’or. Après, il y a une période plus adulte avec des thèmes de société, comme le devin, la zizanie, en Corse, le domaine des dieux…
Le dessin de l’âge d’or était assez dense. Il y avait pas mal de détails.
Si on continue, j’irai vers des thèmes plus contemporains. Pour une reprise, c’était bien d’être dans l’intemporel.
Pas trop dur de changer de dessinateur en cours de route ?
J’ai eu le temps de me faire du souci. Au début, nous avons choisi un dessinateur, qui travaillait comme encreur avec Uderzo. Mais ce n’est pas le même métier. Quand, il a arrêté, nous nous sommes tournés vers un autre dessinateur et l’espoir est revenu.
L’album sera tiré à deux millions d’exemplaires, c’est énorme…
L’album sera tiré à deux millions d‘exemplaires en France. Mais cinq millions au total. Maintenant, il faut qu’ils se vendent. On dit qu’Astérix est franchouillard, mais il est très aimé en Allemagne. C’est un héros aussi populaire qu’ici.
Pas trop dur toute cette promo ?
On nous bombarde un peu partout. Nous sommes déjà allés voir les Écossais, les Portugais. Nous allons aller à Francfort pour la foire du livre et ça continue. On fait le tour des pays. Nous ne sommes pas habitués à ce battage. Nous sommes de gens qui travaillent plutôt dans le calme. En BD, on n’a pas souvent l’occasion de vivre cela. C’est un phénomène à part. C’est aussi pour ça que j’ai fait Astérix. Je me suis dit : «tente et essaye d’écrire un Astérix».
Et maintenant ?
Cela va être intéressant de voir l’accueil du public. Avec Conrad, nous ne sommes pas dépendants d’Astérix, nous avons tous les deux nos propres séries. Maintenant, je vais pouvoir finir «De Gaulle à Londres».
Source:
http://www.ladepeche.fr/article/2013/10/09/1726681-jean-yves-ferri-asterix-faut-bagarre.html